Je répète : « ne dites pas que nous sommes en souffrance » (2)

Société inclusive

Date de rédaction :
29 avril 2014

Le blog de Kate Swaffer provoque des réactions et des échanges entre personnes malades. Richard Taylor, docteur en psychologie vivant avec les symptômes de la démence depuis des années, se montre plus nuancé. »Comme avec la plupart des questions concernant le langage et l’utilisation des symboles pour représenter les êtres humains, c’est compliqué. Oui, dans un sens nous sommes des victimes – nous ne l’avons pas demandé, nous n’avons rien fait pour le mériter, nous ne le voulons pas. Mais, oui aussi, nous dépeindre comme de pauvres victimes ou juste des victimes normales nous présente comme des individus qui avons peu, voire pas de contrôle sur notre qualité de vie. Oui, cela peut être le cas aux derniers stades des symptômes. Oui, pour tous ceux qui ne sont pas dans cet état d’incapacité, le mot de victime et de personne souffrante me laisse à penser, comme beaucoup d’autres personnes que j’ai rencontrées, que les autres nous voient comme n’ayant plus de prise ou d’influence sur nos propres vies, la qualité des vies que nous vivons, l’essence de nos propre désirs et besoins humains. Oui, nous dépeindre ou ne s’intéresser à nous qu’aux derniers stades présente aux autres un exemple clair et mobilisateur (clear and compelling case) pour que d’autres fassent quelque chose pour nous, comme donner de l’argent ou demander au gouvernement de dépenser davantage d’argent pour le traitement et la prévention (…) Nous avons besoin de trouver une nouvelle façon de parler de la démence sans stigmatiser par inadvertance des personnes qui le sont déjà. Je me trompe peut-être, mais je crois que nous devrions plutôt regarder du côté de la non stigmatisation que de mots destinés à créer de la pitié, si nous ne voulons pas de malentendu dans ce que nous sommes fondamentalement quand nous utilisons ces mots. Par exemple, dire ou rappeler à tout le monde que chaque personne atteinte de démence va mourir… C’est vrai, mais cela soutient la croyance que nous allons nous effacer à partir de ce moment (…) Le diagnostic lui-même ne raccourcit pas nit ne rallonge nos vies d’un seul jour. Nous allons toujours mourir, que ce soit dans un accident de voiture dans deux minutes ou de la démence dans dix ans. »