Tant de choses à dire. Ateliers artistiques pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, coordonné par France Alzheimer (3)

Société inclusive

Date de rédaction :
01 juillet 2014

Carole Studer est peintre et médiatrice artistique. Pour elle, « la peinture est une matière qui oblige la personne à s’y confronter par le moyen de la trace, mettant les sens en éveil : le pinceau crisse sur le papier, les couleurs réveillent les pupilles. Par contagion, cette matière va densifier la pensée, qui va elle aussi gagner en consistance : à travers ce qu’elle produit, la personne fait des liens, elle se souvient et elle s’exprime. » Elle observe : « Certains jours, Yvonne n’a pas le moral. Je lui rappelle alors qu’elle peut participer sans se sentir obligée de peindre et qu’elle peut aussi quitter l’atelier quand elle le souhaite. Le cadre est défini comme un espace ouvert. Rassurée, Yvonne vient s’asseoir et commence à manier le pinceau comme si c’était aussi naturel que de prendre une fourchette pour manger. Elle fait des œuvres colorées et s’amuse à y voir des choses. Découvrir sa fantaisie lui fait du bien. Elle quitte l’atelier en me serrant la main : “Je me sens plus légère, plus joyeuse. Vous êtes comme une grande sœur pour moi.” Avec mes quelques décennies de moins, je le prends comme un compliment. La personne en travail nous permet de rentrer en contact non plus avec sa maladie ou ses symptômes mais avec elle, en tant que sujet. » Patrick Laurin, artiste peintre et art-thérapeute diplômé, témoigne quant à lui : « les premières tentatives picturales induisent toujours le désir de produire une image “bien faite” selon des critères normatifs. Avec un tel souci de maîtrise, l’utilisation de la peinture est parsemée d’embûches, de peurs, d’inhibitions. Le propos initial est d’aider la personne à redécouvrir ses propres émotions, ses désirs qui, s’ils sont enfouis ou refoulés, n’en sont pas moins présents. » Il s’agit « d’accompagner la personne, sujet auteur, dans l’élaboration d’une forme qui peut cristalliser l’instant, sans qu’il faille forcément en décrypter le sens, sans qu’il faille systématiquement en rechercher l’origine. » Les temps d’échange avec les autres participants de l’atelier sont importants : « par leur volonté de transmettre, par la richesse de certains échanges, les personnes montrent combien leur inscription dans le présent d’un acte créateur est le témoignage d’un “être qui se dit”. »

France Alzheimer. Tant de choses à dire. Ateliers artistiques pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Paris : Le Cherche-Midi. ISBN 978-2-7491-3602-8.

www.francealzheimer.org/sites/default/files/Tant%20de%20choses%20%C3%A0%20dire_bon%20de%20souscription.pdf. Septembre 2014.